Consommer autrement

Portrait : Jean-Yves Boucher, paysan confiturier

Des fruits. Du sucre. Et l’envie de partager le choix d’une « simplicité volontaire ».

Jean-Yves Boucher

L’Ermitage
53600 Sainte-Gemmes-le-Robert

Jean-Yves Boucher, paysan confiturier

Quand et comment as-tu démarré ton activité?

L’installation remonte à 1997. Pendant 2 ans, je vendais quelques pots sur les marchés. J’ai demandé la certification AB en 1998 et l’ai obtenu en 2000 ; c’est là que j’ai commencé à livrer en  magasins Biocoop, qui représentent aujourd’hui 75% de mon activité. J’ai diminué peu à peu la vente directe pour la vente en magasins, car les conditions de vie familiales sont pour moi prioritaires.

D’où vient ta motivation à faire ce métier et pourquoi en bio ?

Je suis neveu et petit-fils de paysan. J’ai toujours voulu faire ça, et en bio, ce n’était pour moi pas concevable autrement. J’ai passé beaucoup de temps chez mon oncle, et chez une tante aussi, qui avait un jardin. Je me destinais à une Maîtrise dans le secteur de l’aménagement du territoire et l’environnement ; et puis je suis parti faire du théâtre en milieu rural, de 1988 à 1993. Ce passage par le théâtre a nourri un questionnement sur l’identité rurale contemporaine. C’est là qu’avec ma compagne on s’est mis à jardiner, faire de la volaille. Pas pour s’inscrire dans une logique de tradition, de retour en arrière. Mais d’autonomie, de simplicité volontaire, et de plaisir. Pendant toute cette période, j’ai rencontré plein de gens qui m’ont montré qu’il était possible de vivre d’une petite structure respectueuse de l’environnement. Ce sont ces aspects sociaux et environnementaux qui priment pour moi, plus que l’aspect sanitaire de l’alimentation. Et le choix de la confiture : c’est celui de la gourmandise.

Quel regard poses-tu sur les problèmes d’approvisionnement qui se pose aujourd’hui dans le monde de la bio, par rapport à une demande croissante ?

Je n’ai pas la compétence pour répondre à cette question. Je pense juste que tout paysan bio qu’on est, on peut pâtir de terroirs très ingrats, et il faut réfléchir à des productions adaptées à ce terroir, si l’on veut faire autre chose que « bricoler ».  Cela passe aussi peut-être par la spécialisation, pour déjà bien faire ce qu’on fait, en s’éloignant de l’image idyllique de la polyculture. Moi-même je me spécialise vers les fruits rouges et sauvages, et la rhubarbe.  Je suis donc à 50% paysan, et à 50% confiturier. Mais pour les fruits que je ne produis pas, je tiens à garder une cohérence. Pour les pommes et les poires, c’est bien sûr du local. Pour les abricots, qui viennent de la Drôme, c’est du direct et de l’achat groupé, pour réduire au minimum le coût écologique du transport. Pour le sucre, certifié Max Havelaar, je me suis arrangé pour être directement livré de Belgique, évitant ainsi un détour par une plate-forme de Bordeaux. Et -je lance un appel à un ingénieur capable de mettre en place ce type de filière- l’idéal serait d’arriver un jour à travailler avec du sucre blond de betterave.

Qu’aurais-tu envie de partager avec les nouveaux venus qui commencent à découvrir la bio ?

Pas de leçon à donner, surtout… Il y a plein de façons de s’investir, à chacun de faire son chemin ; les discours « fin du monde », c’est pas mon truc. La conscience, elle vient d’une richesse culturelle, pas financière, qui fait qu’on réalise qu’on peut manger, acheter, se déplacer autrement, chacun à son échelle. Cela demande audace et imagination.

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