Consommer autrement

Portrait : Ressources Bio

Ressources Bio, entreprise créatrice de filières bio-équitables de fruits séchés, nous fournit depuis peu mangue et bientôt ananas séchés en vrac. Rencontre avec Sébastien Leray, créateur humaniste et passionné.

Ressources Bio

11A Rue de la Forge
56250 Saint-Nolff

À l’origine de Ressources Bio

C’est une histoire de rencontres ; j’ai fait des études agricoles il y a longtemps et je voulais m’installer en bio, mais je n’ai pas trouvé de terres. La vie m’a amené vers autre chose. Mon épouse travaille à Ecodis (ndlr : plate-forme d’écoproduits basée à St-Nolff, fournisseur de Biocoop Scarabée), j’étais donc en contact avec le milieu de la bio et quelques filières en Afrique. Je suis parti au Burkina pour découvrir la filière coton bio ; le textile m’intéressait. Il y avait beaucoup de coton au Burkina ; Monsanto est passé par là, et a tout saccagé ; il n’y a désormais plus de coton bio ; mais ça va revenir.

 
La Mangue séchée au Burkina

J’ai rencontré là-bas des gens super attachants et intéressants, notamment dans une unité de séchage de mangues, gérée par des femmes ; c’est comme ça qu’on a commencé. Ils travaillaient déjà des mangues, mais avec des fruits pas très mûrs ; on a fait des essais avec des fruits plus mûrs et les résultats gustatifs ont été excellents. Jusqu’ici, ils avaient une salle de mûrissement, avant le séchage.

J’ai beaucoup travaillé avec Ecocert là-bas, qui a un bureau à Ouagadougou. Avec l’association qui sèche les mangues, on a fait venir Ecocert pour voir comment on pouvait passer en bio, ce qui voulait dire se fournir auprès d’agriculteurs qui avaient des pratiques agricoles bio ; sachant qu’à 90%, les mangues produites étaient sauvages, c’est-à-dire sans traitement et issues de la cueillette .
On a donc réuni les 16 agriculteurs qui ont accepté de respecter le cahier des charges Agriculture Biologique ; il y avait un tel dégoût de ce qui s’était passé avec Monsanto que les agriculteurs présents étaient très à l’écoute. Un des problèmes qui se posait aussi était que certains ne savaient ni lire ni écrire ; mais compter : oui.

 
Polyculture

Ces 16 exploitations sont de petite taille et représentent 60 ha en tout ; elles produisent des mangues, des noix de cajou, et produiront de l’hibiscus à partir de 2018. On a décidé de valoriser tout ce qu’il y avait. On a également décidé de planter des bananes ; à Bobo Dioulasso il existe une variété très sucrée, appelée « petite naine » ;  produites toute l’année, les bananes séchées permettraient de compléter la production de mangues qui ne dure que 4-5 mois dans l’année.

 
Projet de développement

Les 16 exploitations et l’unité de séchage ont été certifiées  bio en 2017 avec l’aide de Ressources bio, et seront certifiées « équitables » en 2018, même si le cahier des charges « équitable » d’Ecocert est déjà suivi depuis  le début de la coopération.
Cinquante femmes travaillent sur l’unité de séchage ; dans le cadre de la certification en équitable, une garderie va être créée à côté de cette unité pour que les enfants puissent rejoindre leur maman après l’école et  être accompagnés pour faire leurs devoirs. Un suivi scolaire et un goûter leur seront proposés ; alors que normalement, ils doivent attendre le soir pour manger leur deuxième repas. L’association aide aussi les enfants du personnel à aller à l’école en payant bien ses salariées.

En choisissant le label équitable Ecocert, je m’engage sur l’ensemble de la production sur un prix et à un volume minimum sur 3 ans.

 
Évolution ?

Comme on veut sécher uniquement ce qui est mûr, on ne peut pas dépasser 16 tonnes. Si on dépasse : on commence à attaquer le marché local, et on ne veut pas. On ne sèche  que les fruits  en surplus, ce qui évite le gaspillage de fruits aux champs. Cette année, on a fait 7 tonnes. Les agriculteurs avec lesquels on travaille peuvent aussi commercialiser en bio, sur place.  Pour la suite de la chaîne, je suis le seul distributeur après eux et je fais le lien directement entre l’unité de séchage et les magasins bio bretons.
On peut grossir un petit peu, mais pas tellement plus. Il y a un équilibre entre les agriculteurs impliqués, l’unité de séchage, le projet de garderie… Et je préfère me concentrer là-bas, et en Bretagne-Pays-de-Loire. Je travaille actuellement avec une 30aine de points de vente, des magasins Biocoop et des épiceries fines. Je peux aller jusqu’à une 50aine.

 
L’ananas au Bénin

Au Bénin, le climat est tropical avec  une chaleur humide où l’ananas se plaît bien, rien à voir avec le Burkina !
J’ai beaucoup échangé avec Ecocert à Ouaga. Ils m’ont parlé d’un groupement de producteurs au Bénin qui avait été certifié en bio par une ONG Suisse il y a plusieurs années, mais qui n’avait jamais trouvé de débouchés. Je les ai rencontrés ; on a tout remis en place. Les agriculteurs connaissaient déjà la certification bio, l’outil de transformation avait aussi déjà été certifié ; la certification n’avait juste pas été renouvelée, faute de marché. Le travail là-bas consiste donc à recréer la filière, c’est un travail de fourmi sur le terrain.

 
Le label équitable Ecocert

La production est repassée en bio en 2017, l’objectif est aussi de la passer en équitable en 2018, selon le référentiel Ecocert qui apporte des garanties sur l’ensemble de la chaîne. Je voulais que les producteurs aient une sécurité. C’était important que le passage en bio se fasse la 1ère année, et en équitable la seconde. Monter les deux dossiers en même temps : c’était trop lourd. Et c’est plus facile de s’engager quand on a déjà fait une année, on se connait mieux. Au Bénin comme au Burkina, on a parlé d’équitable tout de suite.

 
Cayenne Lisse

Ressources bio travaille avec 31 producteurs au Bénin, qui produisent deux variétés d’ananas : le Cayenne Lisse, et le Pain de sucre. On a décidé de travailler avec le Cayenne Lisse. Pour une histoire de goût : séché, il est meilleur ; et le Pain de sucre, plus gros, se vend plus facilement sur place. On va également travailler avec des fruits très mûrs, trop mûrs pour être valorisés sur le marché local, mais parfaits pour exprimer un maximum de saveurs une fois séchés.

Il y a une capacité de 2 tonnes par mois maximum. Il faudra beaucoup de temps pour y arriver, le temps nécessaire à la bonne coordination et mise en production de toutes les exploitations. L’une des difficultés rencontrées par les producteurs est de se conformer aux demandes administratives européennes. Par exemple, les accès internet sont limités et le responsable de l’unité de séchage doit faire 30km dans la brousse pour trouver un cyber-café et remplir les procédures dématérialisées. Les premiers ananas séchés de Ressources bio arriveront courant 2018 en Bretagne. Ils sont transportés par bateau.

Tous les enfants des agriculteurs sont dans la même école au Bénin. Pour accompagner la certification équitable, on va voir quel type de projet accompagner, un projet utile pas trop éloigné des producteurs. Il sont dans la zone d’Allada, à côté de Cotonou ; il y a très peu d’exportations. J’ai dû aller voir le roi d’Allada, qui fêtait ce jour-là une naissance. C’est le pays du Vaudou. Sur les marchés, on aperçoit des têtes de rats ou des têtes de chats, destinés à des cérémonies pour convier ses ancêtres… des traditions éloignées de nos elfes et korrigans !

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