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Local & bio &… Solutions aliment-terre pour le monde d’après

Relocalisation de l’économie, autonomie alimentaire, circuits courts : la crise sanitaire du printemps dernier a eu le mérite de faire se poser à pas mal de monde des questions que, dans le monde de la bio, on se pose depuis plusieurs décennies. Nous avons pu, en magasins, nous appuyer sur nos fournisseurs locaux, eux sur nous. Certains ont également vu arriver chez eux de nouveaux-elles consommateur.rice.s, acheter en direct.

Dans cette évolution de notre manière de consommer, « Local » et « Bio » sont souvent associés, au risque d’être amalgamés. Or leur impact écologique est bien distinct. Et leur valeur, pour nous, est dans le « ET » qui les unit.
Au delà du mode de production (bio) et de la proximité, de quels autres leviers disposons-nous, pour faire bouger les lignes, à travers nos choix alimentaires ? Et quels sont leurs impacts, au-delà de certaines idées reçues ? On vous propose pour cette rentrée un bref tour d’horizon des solutions alimen-terre, pour construire ce monde d’après, dès maintenant !

Le local : quel impact ?

Un produit local, dans les critères du cahier des charges Biocoop, est un produit agricole réalisé à 150 km routiers maximum du magasin où il est vendu ; ou un produit transformé dans une entreprise de l’économie locale située à 150 km routiers maximum.

A deux produits équivalents, nos magasins doivent toujours prioriser les produits bio locaux. Pour limiter la pollution liée au transport ? Pas si simple…

Selon l’ADEME (1), les importations seraient effectivement à l’origine de la majorité des émissions GES (Gaz à Effets de Serre) liées au transport de produits alimentaires consommés en France ; 23% seulement du trafic proviendrait de produits origine France, 15% d’origine européenne, et 62% du reste du monde. Des chiffres qui amènent tout naturellement cette étude à conclure :  » Chercher à rapprocher les lieux de production des lieux de consommation est donc un enjeu majeur (…). »

Néanmoins, l’approvisionnement local et direct pose la question de l’optimisation du transport et de la logistique, qui demande une vraie expertise. Selon Gwenaelle Raton, géographe au laboratoire SPLOTT de l’Ifsttar (2), dont les travaux portent sur l’approvisionnement alimentaire des villes, et sur les transports et l’organisation logistique en circuit-court : « Certains circuits locaux sont plus émetteurs de gaz à effets de serre que certains circuits plus longs. (…) Dans les chaines plus longues, on est plus habitué au process d’optimisation ; les camions vont partir à plein, cela peut être des volumes très conséquents. » En circuits « courts », il s’agit généralement « de véhicules utilitaires légers, avec des taux de chargement faibles, des allers-retours beaucoup plus conséquents » ; et, souvent, « avec des retours à vide. »

Un bon circuit serait donc au plus près, mais avec « un système de distribution optimisé : optimisation du trajet, adaptation du véhicule, mutualisation du transport-stockage. »

Si des pistes de réflexion émergent dans notre région, « Il n’y a pas forcément d’accompagnement des producteurs locaux sur ce point » admet Maëlle Robert, chargée du développement local Grand Ouest à Biocoop. « L’amélioration de la logistique vient plutôt avec la mise en place de la planification de la production avec les maraîchers, comme le fait Scarabée ». On y revient plus loin.

 

Marché des producteurs, Scarabio Festival 2019.
Le mode de production a plus d’impact que le local

En terme de GES, c’est au niveau de la production de notre alimentation que les émissions sont les plus importantes, et que nos choix alimentaires peuvent également peser.

67% de ces émissions sont liées à l’agriculture. Loin devant les 19% liées aux transports (3). Contre toutes idées reçues (« Moi j’achète pas bio, mais j’achète local, c’est pareil »), le choix de production agricole prime donc sur le transport, en terme d’impact écologique.

Or nos magasins et restaurants sont avant tout des outils pour développer l’agriculture bio, autour d’eux. C’est « THE » premier objectif, qui ouvre la charte Biocoop : « Notre réseau de magasins Biocoop a pour objectif de développer l’agriculture biologique dans un esprit d’équité et de coopération ».

Au-delà des mots, cela donne quoi, concrètement ? Cela donne près de 200 fournisseur-euse-s locaux-ales, avec lesquel-le-s nos magasins et restaurants rennais travaillent actuellement. Sur l’année écoulée, tous rayons confondus, Biocoop Scarabée a réalisé une moyenne lissée d’environ 21% de ses achats en local.

Ce pourcentage varie beaucoup selon la saison, et les produits. Sur les « fruits et légumes », cet approvisionnement local représente entre 15% au plus bas (au printemps), et 50%, en automne, au plus haut. à noter que ce pourcentage inclut et est impacté par tous les produits qui ne peuvent être produits en local – bananes, fruits exotiques, agrumes, fruits d’été plutôt récoltés dans le sud de la France, raisins… Mais en tout cas : tout ce qui peut être produit et acheté en local l’est. Jusqu’à 80 % des légumes sur l’automne-hiver ; 100 % de pommes de septembre à février.

Au rayon boulangerie, l’offre est 100% locale, à une exception près (« Le pain des femmes »). Au rayon boucherie 70% de l’offre est locale.
Bref, sur les rayons ultra-frais : le local a la part belle…

Derrière ces pourcentages : des producteur-rice-s et fournisseur-euse-s qui s’installent et peuvent vivre de leur activité, en partie grâce à vos achats. Des terres qui se développent en bio autour de Rennes et dans le département. Des haies replantées, de la biodiversité, des eaux préservées. Et oui…

Logique excentrique

Si la priorité est toujours donnée à l’approvisionnement local, tout ne peut évidemment pas être local dans nos rayons. Notre logique étant « excentrique » : priorité au local, puis au régional, puis au national avec, entres autres, les filières « Paysan.ne.s associé.e.s » créées par Biocoop il y a 20 ans, puis pays limitrophes. Et, au-delà, pour les produits exotiques, avec des filières d’approvisionnement tracées et en bio-équitables pour la banane, le cacao, le café, le thé (excepté celui provenant du Japon), les tablettes de chocolat et le sucre de canne.

Il est donc possible pour ceux-celles qui le souhaitent de faire leurs achats exclusivement en local et/ou régional, l’origine de production et de transformation étant visible sur les produits ou en rayons. Le pourcentage d’achats locaux apparaît également sur votre ticket de caisse.

Plus proches et en direct : on travaille autrement

Travailler en direct avec des fournisseur-euse-s locaux-ales que l’on connaît, qui viennent livrer en magasin, implique aussi une autre manière de commercer. L’intérêt du local est, aussi, beaucoup, dans la coopération qu’il permet. La possibilité de se rencontrer, la concertation facilitée par l’échange direct.

Elle s’illustre tout particulièrement à Biocoop Scarabée dans la planification de la production en fruits et légumes. Chaque année, Hughes Van Kriekinge, référent « fruits et légumes », organise une réunion avec les maraîcher-ère-s pour faire le point sur les besoins de nos magasins pour l’année à venir, en terme d’offre et de volumes. Ce qui permet à nos fournisseur-euse-s de s’organiser, éventuellement de se répartir les variétés et d’être complémentaires.

Celles et ceux ayant de petits volumes de production livrent les magasins les plus proches de leur ferme, pour rationnaliser les trajets.

Cette planification, la visibilité des besoins qu’elle permet, permet d’intégrer de nouveaux-elles maraîcher-ère-s. C’est également l’occasion d’évoquer les difficultés rencontrées, les besoins et attentes réciproques. Tout au long de l’année, cette concertation est présente, plus particulièrement en maraîchage et en arboriculture, très tributaires des aléas climatiques et naturels.

Et c’est gagnant-gagnant. Pour nous comme pour les fournisseur-euse-s direct-e-s, cela permet de s’organiser, de s’ajuster. Et de collaborer dans la durée, pas « au coup par coup ».

De la fourche à la fourchette

Du côté consommateur-rice / producteur-rice, également, la proximité et la possibilité de l’échange direct qu’elle permet a une vraie influence. Un producteur-rice susceptible d’être questionné-e sur sa manière de travailler et de pouvoir l’expliquer ne travaillera généralement pas avec la même conscience et le même souci de qualité, étant exposé-e aux éventuels retours de celles et ceux qui achètent ses produits.

Ce lien avec les producteur-rice-s locaux-ales, nous essayons de vous le faire partager, autant que faire se peut. à l’occasion d’animations fournisseurs en magasin, même si il reste difficile pour la plupart d’entre eux de se libérer de leurs contraintes professionnelles. Le marché des producteur-rice-s locaux-ales, organisé chaque année à l’occasion du Scarabio Festival, a été créé dans ce but. Les visites chez nos producteur-rice-s aussi. Parce qu’on ne fait évidemment pas ses courses de la même manière, lorsqu’on sait qui a réalisé le produit que l’on achète, où et comment il-elle l’a réalisé.

Local, bio, et…. flexi !

Mais revenons à ces 67% de GES liées à l’agriculture. De quoi se composent-ils ?
De méthane, pour 44%, issu de la fermentation entérique par les ruminants et des effluents d’élevages. De protoxyde d’azote pour 34%, qui provient principalement de la fabrication et de l’usage d’engrais azotés sur les sols agricoles. Et de CO2, pour 22%, issu de la consommation directe d’énergie des exploitations (matériels et bâtiments, fioul pour les tracteurs, chauffage des serres…) et d’émissions indirectes liées au recours à d’autres intrants (autres fertilisants, produits phytosanitaires), à la fabrication de matériel et construction de bâtiments (1).

Comme le conclut ce même rapport de l’ADEME : « Il apparaît clairement que l’évolution de l’assiette des ménages vers une alimentation moins carnée et la réduction du recours aux intrants azotés pour l’ensemble des productions agricoles, revêtent un enjeu majeur dans une stratégie de réduction des émissions de gaz à effet de serre ».

Ce même rapport souligne que si le régime alimentaire des Français.e.s, lui, n’est composé que pour un tiers de produits animaux, « la viande et les produits laitiers totalisent 85 % de l’empreinte GES de notre alimentation au stade agricole ».

Une alimentation bio, locale, et flexitarienne est donc un moyen tangible de réduire les émissions GES liées à notre alimentation.

 

Les rayons vrac, emblématiques d’une alimentation plus végétale, moins transformée, et « zéro déchet ».
Ni végé ni vegan : flexi !

Nos magasins ne sont pas des magasins végétariens ou vegan, et n’ont pas vocation à l’être. Mais ils ont toujours promu une alimentation plus végétale, avec une diversité d’offre, entre autres en céréales, légumineuses, oléagineux. Avec une approche, concernant l’offre carnée, de « moins, mais mieux ! ». Moins en quantité, bien mieux en qualité. Et locale !

Au-delà d’une offre diversifiée en magasin pour celles-ceux qui souhaitent manger plus végétal, dépliants, livres de recettes, ateliers et démo-cuisine que nous proposons toute l’année sont un moyen d’accompagner, concrètement, celles et ceux qui souhaitent passer à une alimentation flexitarienne.

Brut

Ce même rapport sur l’empreinte énergétique et carbone de notre alimentation souligne que « la consommation d’énergie liée à la transformation des produits est du même ordre de grandeur (4,9 Mtep, Mégatonne équivalent pétrole) que la consommation d’énergie de l’étape agricole. »
A l’exception des fruits, légumes et produits de la mer frais, l’essentiel des produits consommés en France a subi une ou plusieurs étapes de transformation.
Les produits qui ont des facteurs de consommation d’énergie et d’émissions les plus élevés à la tonne produite, par ordre décroissant, sont : les pommes de terre transformées, les boissons alcooliques distillées, et les plats préparés.

Au-delà du fait de mettre la pédale douce sur les associations improbables type « frites surgelées-vodka » ou « pommes dauphines-whisky » (ton estomac te dira « merci »), privilégier les produits « bruts », non-transformés, apprendre à les cuisiner, est donc aussi une vraie solution pour réduire l’empreinte carbone de son alimentation. Ce qui n’empêche pas de s’acheter un p’tit truc tout prêt (et mieux vaut l’acheter en bio et local) en dépannage, de temps à autres.

Bref, pour réduire son empreinte carbone : cui-si-nez  ! Et, là aussi, les nombreuses animations en magasins et les ateliers-cuisine proposés tout au long de l’année ont été pensés pour accompagner celles et ceux qui le souhaitent.


Les ateliers de cuisine Pique-Prune pour les enfants, font partie des nombreux ateliers « Faire soi-même » proposés par Biocoop Scarabée tout au long de l’année.

ça emballe grave

Selon l’ADEME toujours, « l’évolution des modes de vie et de consommation a donné lieu à un doublement des quantités de déchets générés par les ménages en 40 ans soit 30,6 Mtonnes en 2015 » (4). Chaque français.e produirait en moyenne 590 kg de déchets par an. Sans parler des entreprises et des collectivités…

L’emballage le moins polluant étant celui qui n’existe pas, notre coopérative est très engagée, depuis longtemps, dans la réduction des emballages jetables et le déploiement du vrac. Tous nos magasins confondus, 511 références sont proposées en épicerie alimentaire, 26 en produits lessiviels ou cosmétiques. Nous avons été le premier magasin dans le réseau Biocoop à déréférencer l’eau en bouteille plastique jetable. Jolie pagaille au début, ce choix n’était pas du goût de tou.te.s nos client.e.s, changer ses habitudes n’est pas si simple.

Au-delà du vrac, aujourd’hui déployé sur les rayons ultra-frais avec la possibilité d’utiliser vos propres contenants : le réemploi, avec le dispositif « Rapportez-moi », est un autre levier pour réduire l’impact écologique des emballages en verre.

La limite du vrac ? La protection et la conservation de certains aliments ; et son inaccessibilité aux personnes souffrant d’allergies alimentaires. Pour les personnes juste intolérantes à un ingrédient, comme le gluten par exemple : pas de souci, elles peuvent faire leurs achats au rayon vrac épicerie. Mais impossible pour une personne allergique, compte-tenu du caractère volatil de certains ingrédients. Les problèmes d’allergies nous rappellent que l’emballage reste parfois indispensable pour protéger les aliments.

En conclusion, les ressources ne manquent pas, dans nos magasins et restaurants, pour réduire l’impact de son alimentation : bio, bien sûr, et locale, et flexi, et moins transformée, et non-emballée… Le moteur de ces changements d’habitudes, passé la porte de Biocoop Scarabée : c’est vous ! Au détour d’une discussion entre collègues, en famille, entre ami.e.s. à plus de 57000 sociétaires SCARABEE (mazette…), normalement, on devrait pouvoir le tricoter ce monde d’après…

1 « L’empreinte énergétique et carbone de l’alimentation en France, de la production à la consommation », janvier 2019, ADEME, à retrouver sur www.iddri.org.
2 https://www.ifsttar.fr/ressources-en-ligne/espace-science-et-societe/territoires/multimedia/webdoc-le-circuit-court/#Les_circuits-courts___un_objet_de_recherche
3 Infographie « Impact de notre alimentation sur l’environnement#AlimentationDurable« , février 2019, ADEME.
4 www.ademe.fr/expertises/dechets